COVID-19

Le plan coréen contre le Covid-19 : tout a reposé sur la compétitivité

Le plan coréen contre le Covid-19

Par Philippe LI, Président Honoraire de la FKCCI & avocat associé au cabinet Kim & Chang

 

Le dispositif à trois volets qui a été mis en place par la Corée pour lutter contre le coronavirus est maintenant bien connu : prévenir, traiter et encore prévenir.

La prévention a consisté à instaurer les gestes barrière, à commencer par le port généralisé du masque et à procéder à des dépistages à grande échelle.

Le traitement a visé l’identification et la dispense de soins aux porteurs de virus et à conduire un traçage en remontant la chaîne de toutes les personnes ayant été approchées et potentiellement infectées, à les soigner ou les mettre en quarantaine.

Enfin, la prévention en bout de course a consisté à désinfecter, voire procéder à la fermeture des lieux infectés, des espaces environnants et de tous ceux où les porteurs de virus avaient pu se rendre.

L’élaboration et la mise en œuvre de cette méthodologie a été possible grâce à différents facteurs, qui tiennent à la capacité de la Corée à se montrer compétitive. C’est parce que la Corée prône, parfois même de manière outrancière la recherche de la compétitivité, que son plan a pu fonctionner.

 


 

Le plan

 

Les précédents virus qui s’étaient propagés ces dernières années (SARS, MERS) avaient fait des dizaines de victimes et laissé des traces. Tirant les leçons de ces épidémies, la Corée a pu disposer d’acquis logistiques, organisationnels et réglementaires mis en place pour faire face à une nouvelle crise sanitaire. Notons que contrairement à ce qu’on a pu lire, les lois coréennes relatives à la protection des données ne sont pas moins strictes que le GDPR (règlement général sur la protection des données) européen. Les textes qui permettent le traçage ont été adoptés par l’Assemblée Nationale suite à la crise du MERS à la demande expresse des citoyens. Des travaux publics en commission parlementaire avaient alors été diligentés. Au demeurant, on peut penser que le rapport des Coréens avec la technologie et leur agilité dans le domaine les a conduits à appréhender le traçage comme un recours technique maîtrisable et susceptible de fonctionner dans des circonstances exceptionnelles, avant de le considérer comme une atteinte à leurs libertés.

En déployant son plan, la Corée n’a pas cherché à mettre en place une modélisation infaillible. C’est l’action qui a permis de définir la stratégie car comme tous les autres pays, la Corée a tâtonné sur de nombreux sujets comme la fermeture des frontières, le choix des personnes devant être dépistées…avant de trouver la bonne formule.

 

Réactivité et vitesse d’exécution

 

Quand on vit et qu’on travaille en Corée, on est habitué à devoir être réactif et agir rapidement. Le processus de fabrication d’un produit, depuis son élaboration jusqu’à sa mise sur le marché prend trois fois moins de temps que dans la plupart des pays occidentaux. On a observé exactement le même phénomène lorsqu’il a fallu développer des kits de tests.

 

Communication et mobilisation

 

Dans les briefings faits aux médias, les pouvoirs publics et en particulier le KCDC (Korea Center for Disease Control & Prevention) ont employé un langage factuel et pratique. Parler clair et simple a permis de conférer de la lisibilité au plan d’action.

Il faut d’ailleurs relever qu’avant même que les pouvoirs publics ne déclenchent le branle-bas de combat, les populations avaient bien compris l’importance des risques générés par le coronavirus et s’étaient en quelque sorte placées sous un mode d’auto-mobilisation. Comme à chaque fois que la nation est confrontée à un enjeu important, la Team Corée s’est mise en place.

 

Capacité à sortir du cadre

 

Toutes les sociétés implantées ou en relation d’affaires avec la Corée, qu’elles soient coréennes ou étrangères y ont eu maille à partir avec une forte bureaucratie, des réglementations contraignantes et des administrations rigides. Or, face au coronavirus, on n’a jamais eu le sentiment d’assister à de tels blocages, ou que l’Administration pouvait être un frein au cours des choses. Un bon exemple peut être tiré de la manière dont le gouvernement a géré la fourniture des masques.

Au pic de la crise, le gouvernement coréen avait annoncé qu’il serait en mesure de fournir des masques pour tout le monde, ce qu’il avait été incapable de faire pendant plusieurs jours, déclenchant mécontentement et colère chez beaucoup de Coréens (il faut se rappeler que plusieurs centaines de milliers de personnes avaient signé une pétition au tout début de la crise pour réclamer la destitution du Président Moon). Passé cette période de flottement, le gouvernement a alors eu l’idée astucieuse d’approvisionner les pharmacies à raison de deux masques par semaine et par personne, à des jours réservés en tenant compte du dernier chiffre de la date de naissance. Le système est aujourd’hui tellement bien rodé qu’il parait évident, mais il faut reconnaitre qu’il fallait y penser. Inventivité et capacité de déploiement ont caractérisé l’action étatique coréenne en l’espèce, mais on a également pu y retrouver des fondamentaux indispensables de la compétitivité que sont la réactivité et la vitesse d’exécution.

Le regard qui a été porté par la France sur la Corée pendant la crise du coronavirus a été particulièrement aigu. Jamais la Corée, même lors des Jeux Olympiques ou de la Coupe du Monde, n’a bénéficié d’une telle couverture médiatique. Les médias français ont été frappés par l’efficacité de la Corée mais parallèlement, on a pu lire qu’elle avait employé des méthodes liberticides et même dans une certaine tribune, que la Corée était connue pour former et rémunérer des milliers de délateurs !

Rappelons-nous également qu’il y a quelques années, un membre du gouvernement français avait accusé des constructeurs automobiles coréens de pratiquer un “dumping inacceptable”, ce qui s’était avéré complètement infondé.

 

Plutôt que de chercher à opposer et hiérarchiser les valeurs et les systèmes, il faudrait davantage prôner le benchmarking. Le benchmarking permet de s’ouvrir à des schémas méconnus ou originaux, de prendre le pouls du monde. L’exercice nécessite de développer une capacité d’analyse précise, objective, d’accepter de se remettre en cause et de se débarrasser de poncifs commodes. C’est également en recourant à un benchmarking extensif que de nombreux pays asiatiques ont su se développer en recherchant les bonnes pratiques pour s’améliorer.

 

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